INTERVIEW : René, le Lapin Blanc de PARADIGM Films : Design Fiction et Escape Game Maison !

PARADIGM Films produit entre autres des clips, tel le très réussi What I Want de René & Félix Métayer :

René.

PARADIGM Films, dans le radar du Bureau parisien du Musée du Fake car une des rares sociétés spécialisées dans le Design Fiction , lance Escape Maison, le « 1er escape game à domicile, écoresponsable, durable et artisanal » ! Il était temps de rencontrer René, le Lapin Blanc pas loin de son terrier dans l’Est parisien.

Nous connaissions les Escapes Games physiques, les jeux de rôle en-ligne, mais pas l’Escape Game à domicile, pouvez-vous nous en expliquer les grandes lignes ?

Le concept de l’escape game à domicile (ou escape box) est simple : recréer une partie d’escape game entre amis dans son salon. Il existe une pléthore de variantes pour pousser plus ou moins le niveau d’immersion des joueurs. Idéal pour s’évader pendant le confinement par exemple ! 
Malheureusement, après avoir testé plusieurs formules différentes, j’ai regretté l’absence de conscience environnementale dans le mode de production ou distribution, d’autant plus qu’il s’agit de jeux à usage unique… Les accessoires sont souvent limités : de simples cartes, ou objets de qualité relative qui sont fabriqués de manière industrielle en Chine ou en Pologne. De plus, l’atmosphère musicale, sonore et lumineuse est souvent bâclée alors qu’elle revêt un caractère important du fait de l’immersion des joueurs. L’idée de repenser ce modèle économique non durable s’est alors mise à germer dans mon esprit.

Alice est un symbole dans les univers de créations interactives et de game design. En écriture créative transmedia on évoque souvent le « rabbit hole » : un lecteur ou spectateur change la narration en choisissant une galerie plutôt qu’une autre. Est-ce pour cela que vous avez choisi le monde d’Alice ?

En tant que retardataire chronique, je me suis toujours identifié au Lapin Blanc qui court après le temps. Blague à part, et malgré toute la force symbolique dont l’œuvre de Lewis Carroll Alice au pays des merveilles est empreinte, mon choix d’exploiter cet univers fantastique pour mon premier scénario d’Escape Maison n’est qu’une succession de coïncidences ! Lorsque j’ai eu l’idée de concevoir un escape game à domicile artisanal pour amuser mes amis il y a presque deux ans, j’étais plongé dans la version bilingue du livre pour ma culture personnelle (j’étais d’ailleurs plus focalisé sur la partie française tant la version originale et son anglais ancien est difficile à déchiffrer…). C’est alors que la vision d’une boîte de jeu aux multiples mécanismes et salles miniatures afin d’illustrer les méandres du Pays des Merveilles m’est venue. Découvrant également de nombreux détails méconnus de l’histoire dans le livre, je me suis attaché à respecter au plus près l’œuvre d’origine. Le fil rouge de mon jeu est d’ailleurs de retrouver des pages perdues du livre qui servent de support aux différentes énigmes à résoudre.

Racontez-nous en quoi votre version d’Alice est écoresponsable ?

Mon travail d’adaptation d’Alice au pays des Merveilles en jeu Escape Maison a été guidé par l’envie de questionner nos pratiques de consommation ludiques et d’améliorer le niveau d’immersion des joueurs dans ce système d’escape box.
Partant du principe que la vente d’un jeu à usage unique était contraire à toute logique écoresponsable, je me suis orienté vers un système basé sur de la location. Ce choix me permet de privilégier la qualité à la quantité, favorisant ainsi la production artisanale et la recherche d’objets véritables.
Afin de renforcer l’immersion des joueurs par l’authenticité des accessoires, j’ai privilégié le marché de la seconde main. Ainsi, ai-je donné une seconde vie à des objets qui ont du vécu et de la “gueule”. Même la mallette de transport provient de la récup’ !
La boîte en bois Le Terrier est conçue par un artisan français, Teddy Mathieu, qui possède son atelier dans un petit village de la Loire.  N’étant pas dans une logique de production industrielle, nous avons pu privilégier des matériaux nobles (bois, métal, liège).
Globalement le circuit court a également été favorisé, tant au niveau de la recherche des accessoires qui composent les mallettes de jeu qu’au niveau du périmètre restreint de la livraison à domicile assuré par un réseau de distribution de proximité grandissant de responsables Escape Maison.
Et en bonus, je me suis engagé à planter un arbre par partie jouée auprès de l’ONG Planète Urgence. Je n’ai pas encore fait de bilan carbone précis du projet mais je m’y mettrais certainement bientôt !

Vous êtes aussi réalisateur de design fiction. Au Musée du Fake nous dansons toujours sur la ligne de crête entre fiction et réalité donc votre métier nous fascine. Etes-vous aussi militant que les Yes Men qui eux aussi éditent de faux journaux, faux sites, fausses interventions en conférences ou en facs… ?

Je commencerais par distinguer mon travail d’auteur / réalisateur de Design fiction qui reste un travail de commande pour des organismes publics ou des entreprises du secteur privé, de mon militantisme personnel à travers mes œuvres de fiction autoproduites.

Pour rebondir sur l’aspect interactif des Yes Men que vous mentionnez, j’ai réalisé un film de Design fiction il y a 2 ans en partenariat avec le collectif Making Tomorrow et le groupe Onepoint x Weave qui a été projeté lors du salon DeepTech “Hello Tomorrow” devant un public non averti (et crédule).

L’idée était de créer de toute pièce une fausse start-up qui utiliserait une vraie découverte scientifique, celle de la visualisation des particules fines dans les cellules pulmonaires, pour en faire un objet de haute technologie. Cet outil qui devait initialement permettre de prouver le lien de causalité de la pollution de l’air sur la santé publique afin de mieux défendre les citoyens face aux gros industriels pollueurs, a finalement été exploité comme outil business auprès des banques, des assurances et même des applis de rencontre …

Ce genre d’expérience collective nous rappelle qu’il est toujours bon de rechercher l’origine d’une information, et, idéalement, d’en croiser les sources. Difficile à une époque où nous sommes submergés par la quantité d’informations qui nous parviennent quotidiennement, sans compter l’usage grandissant du deepfake dans les années à venir…

Outil de réflexion à l’innovation, le Design fiction met en exergue certains aspects précis de ces visions anticipatoires aux relents dystopiques façon Black Mirror. Il questionne la morale derrière une pratique nouvelle ou une technologie émergente, et se pose comme garde-fou des dérives de notre société en constante mutation.

René

D’un point de vue plus personnel, je suis actuellement en développement d’une série thriller Dictature Verte qui plonge le spectateur dans une société française de 2030 qui aurait pris un virage environnemental fort. Pour construire cet univers – de l’ordre du fantasme aujourd’hui – je me base sur les travaux du think tank The Shift Project dirigé par Jean-Marc Jancovici. Leurs travaux exposent des solutions systémiques pour faciliter la transition environnementale en prenant la décarbonation de notre économie et l’emploi comme clés de voûte. L’objectif de Dictature Verte est de vulgariser ces rapports indigestes pour le commun des mortels (et moi le premier), en leur donnant corps, mais aussi de créer une vision enthousiasmante d’un futur proche, proposition qui semble de plus en plus rare dans le paysage audiovisuel d’aujourd’hui.

A l’instar de la Convention Citoyenne pour le Climat – qui restera, je le crains, un écran de fumée médiatique et politique – The Shift Project, et in fine la série, amène des nouvelles idées et mesures concrètes, réalistes, sur la table. Car le manque d’informations sur ces sujets pourtant essentiels, génère un immobilisme généralisé, une peur du lendemain qui n’est bénéfique pour personne, à l’exception des court-termistes adeptes du “business as usual”.

Qui est René ?

René, c’est un pseudonyme de création qui permet de mettre plus facilement de côté son égo avant de se lancer dans l’écriture d’un scénario ou la création d’un projet. René cache peut-être plusieurs identités d’ailleurs… Fake news ? Intox ? Deepfake ? Pilule rouge ? Bleue ? Mais que savez-vous vraiment de la réalité ? Vous devriez suivre le lapin blanc dans le Pays des Merveilles, ça vous remettra les idées en place.
Merci à vous et bonne continuation !

LIENS
Terrier de René : moinsune.fr
FB : facebook.com/escape.moins.une/
Maison d’Alice : https://www.paradigm-films.com/

Article mis à jour le 23.01.2022 avec nouveaux liens.

INTERVIEW EXCLUSIVE d’Eva Carmen Jarriau, Directrice du développement des CEPM (Centre Évaluatif Post-Mortem)

Alors que luttes et grèves contre les réformes des retraites s’intensifient évoquons l’après retraite, avec une spécialiste de la traversée vers la Grande Suite.

1/ Le Conseil National de la Résistance avait préfiguré le système de la Sécurité Sociale pendant la seconde guerre mondiale… La prise en charge post-mortem des français, elle, date de 1914. Ce service public unique au monde fonctionne depuis sans discontinuité…

En effet, la première et deuxième guerre mondiale ont été des vecteurs sans précédents dans la création des CEPM, ils ont été institué grâce à un décret de Raymond Poincaré à la suite de la bataille de la Marne, dévastatrice. Jusqu’à ce moment-là, il y avait certes les décès d’ordre infanto-juvénile qui faisaient des ravages mais jamais autant de décédés en masse que comme pour ces deux guerres. Les décédés étaient livrés à eux-mêmes, souvent dans l’incompréhension d’une mort aussi soudaine, avant d’arriver dans la Grande Suite et cela créait beaucoup trop d’encombrements, voilà comment les CEPM sont nées.

Mais ce n’est pas tout, c’est après la deuxième guerre mondiale, avec le début de l’essor industriel et surtout l’arrivée des Trente Glorieuses et son fameux pic de natalité le baby boom que la Grande Administration décide d’anticiper sur les futurs décédés. Nous vivons actuellement dans une période charnière de la société française car cette génération de baby-boomers ont désormais l’âge d’être des papy-boomers. Et là, il n’est plus du tout question de mort en masse, on assiste à une rectangularisation de la courbe de survie car il n’y a plus de morts massives ou prématurées causées par les guerres ou les épidémies… Tout le monde meurt majoritairement «vieux ». 200 000 personnes, c’est le chiffre de décédés en plus chaque année en France. Cela fait un nombre conséquent de passagers à accompagner pendant chaque traversée au CEPM.

Le CEPM nº7 est le centre recouvrant l’île de France, et il serait franchement de bonne augure d’en ouvrir un deuxième. La Grande Administration ne l’entend pas de cette oreille et préfère envoyer les médiateurs en formations numérique afin de fluidifier les différentes procédures au sein même de la traversée plutôt que de recruter… mais ça c’est une autre histoire.

Site internet du CEPM, un service public de la Grande Administration.

2/ Tout décédé doit remplir un Formulaire Individuel de Recensement Mortem, le fameux « FIRM » : Pourquoi est-ce obligatoire ?

Le FIRM est utile au bon déroulement de la traversée de chaque passager. En effet, certaines données du FIRM, remplis par les passagers, sont utilisés par l’équipe de médiation pour résoudre certains blocages chez les passagers. Ces blocages sont souvent d’ordre inconscient, en effet, beaucoup de passagers arrivent au CEPM avec une quantité de manifestations inconscientes comme les rêves ou les cauchemars qu’ils n’ont jamais vraiment pu interpréter et donc d’une certaine manière, résoudre. Les médiateurs sont là pour y répondre et les retraverser de manière collective.

D’autre part, certains souvenirs de vie chez certains passagers sont douloureux et leur provoquent des remords. Les médiateurs vont retraverser certains souvenirs de passagers afin d’alléger ces préoccupations et se découvrir une Suite plus tranquille.

Les griefs envers certaines personnes encore sur Terre est un sujet de plus en plus présent au sein des traversées. Voilà pourquoi le FIRM est indispensable : il permet aux passagers d’aller vers la Grande Suite dans la plus grande sérénité possible.

3/ La plupart des religions ne s’étendent pas sur les détails pratiques. Ainsi sur le site du Vatican pour une définition de la résurrection de la chair on lit «Comment se fera la résurrection dépasse les capacités de notre imagination et de notre entendement » . Faut-il avoir peur de la Grande Suite ?

La Grande Suite, comme son nom l’indique, est grande. Elle est aussi grande que peut l’être notre cœur et notre acceptation de la mort. Voilà pourquoi le passage au CEPM est si important et représente un moment de transition important pour les passagers. Il représente un temps de réflexion non négligeable au regard de la société dans laquelle nous sommes amenés à vivre. Une société toujours empreinte à l’individualisme et au non dialogue.

Au CEPM, le passager n’est pas seul dans sa démarche; il va vivre la mort collectivement, non seulement accompagné par les médiateurs mais surtout par les autres passagers. Cette traversée va lui permettre d’entrevoir autre chose que la douleur liée à sa propre mort et de prendre de la distance vis-à-vis de son Antécédent, de pouvoir lâcher prise et ouvrir son cœur pour aller de l’avant.
Jusqu’à présent, personne n’est revenu de la Grande Suite car les vérifications palingénésiques réalisées en amont de la traversée permettent aux médiateurs de détecter si le passager doit bien suivre son parcours au sein du CEPM ou au contraire repartir vers son Antécédent, sa vie.

4/ Un de vos outils, le SQDA (Sondage Qualitatif de l’Antécédent) permet aux CEPM d’améliorer les expériences de vie sur Terre ! Comment vos médiateurs très qualifiés arrivent à faire le tri entre faux souvenirs, exagérations, vraies pistes d’amélioration, ou mauvaise foi des passagers ?

Les données récupérées dans le SQDA sont des variables d’ajustement importantes pour notre Antécédent. Ces modifications apportées sont le fruit d’un nombre conséquent de sondages effectués et qui englobent évidemment une quantité de mensonges mais aussi de réponses tout à fait honnêtes, ces réponses et modifications de la vie sur Terre sont à l’image de ceux qui sont passés sur Terre. D’ailleurs, une piste d’amélioration pour l’un est une voie totalement erronée pour l’autre. En quelque sorte, qu’il s’agisse d’une exagération ou de mauvaise foi, les résultats reflètent toute cette subjectivité. C’est d’ailleurs pour cette même raison que les ajustements de l’Antécédent sont invisibles à l’œil nu; sinon la faim dans le monde auraient été éradiquée depuis longtemps…

5/ Avez-vous une anecdote de bureau à partager ?

Une des médiatrices nous cache quelque chose. C’est ce que nous apprendrons lors de la Traversée numéro 186378566.

La Grande Suite, Expérience théâtrale immersive au CEPM n°7

Des traverséees au CEPM n°7, le centre francilien, sont organisées et guidées par une équipe d’employés -les médiateurs- professionnels et engagés, les 20 et 21 décembre 2019 avant reprise en 2020. A partir de 13 ans, durée 1h30. https://www.helloasso.com/associations/compagnie-359-degres/evenements/bienvenue-au-cepm-n-7

INTERVIEW : Dot Pierson, co-créatrice de HEROES, spectacle immersif rock !

YOU COULD BE HEROES JUST FOR ONE NIGHT

« Heroes », David Bowie

Dot, Peux-tu nous présenter Heroes, ton rêve éveillé du 11 avril prochain ?

Heroes est un spectacle immersif théâtral, expérimentiel et musical autour du rock. Nous sommes partis de ce point de départ: nous manquons de héros et de héroïnes.
Notre époque souhaite en (re)trouver et pourtant, les illusions n’ont jamais été autant déceptives. Nous vivons dans un monde où l’on ne croit plus aux utopies politiques, où l’on se met en scène perpétuellement utilisant massivement la technologie, où même l’amour se scroll sur un écran. Où chercher ? Comment en (re)trouver ? Nous avons imaginé une solution qui se trouverait peut-être dans la musique. En effet, celle-ci compte un nombre considérable de héros. Mais ceux-là disparaissent petit à petit : et encore une fois nous nous retrouvons face à la peur de les perdre.
Nous avons monté ce spectacle autour des grands héros du rock, principalement des années 60/70 avec une pointe de 80. Nous avons aussi agrandi le cercle aux auteurs de cette génération. Nous proposons aux spectateurs de venir les “réveiller”. Bien loin d’un musée de cire, il s’agit plutôt de se confronter à “l’âme” de ces personnalités et d’y comprendre en quoi ils sont représentatifs d’une certaine forme d’héroïsme. A partir de cette invitation, le temps d’une soirée, le public sera amené à trouver dans ce labyrinthe interactif et artistique ceux qui nous ressemblent bien plus que nous ne pouvons l’imaginer. Il partira à la découverte de créatures fascinantes en étant créateur de son expérience et apprendra beaucoup sur lui-même et le héros qui est en lui.

On y croisera des sosies de Davie Bowie, Mick Jagger, Janis Joplin, Bob Dylan… quelle affiche ! Doit-on venir nous aussi maquillés et costumés ?

Heroes n’est pas un spectacle de sosies. Evidemment, les personnages seront très reconnaissables mais cela n’est pas le but. Nous souhaitions surtout travailler sur leur “âme”. Nous avons décidé de choisir 7 membres emblématiques du club des 27: Brian Jones, Jimi Hendrix, Jim Morrison, Amy Winehouse, Janis Joplin, Robert Johnson et Kurt Cobain. Nous en avons tiré 7 grandes thématiques qui sont importantes dans leurs travaux et vies respectives. De là, nous avons construits tout le spectacle. L’affiche est merveilleuse, en effet. Je n’ai pas l’habitude de travailler tous les jours avec Freddy Mercury, Anita Pallenberg et Lou Reed ! Cela prête à de jolis moments de discussion avec notre superbe équipe de costumières (dont Emilie Malfaisan est la costumière en chef) et de maquilleuses (avec Mara Sastre à la tête) qui m’appellent pour me demander quel eye liner irait le mieux pour Edie Sedgwick ou si la tunique de Bowie est à la bonne taille. Se dire que je vais répéter avec Bob Dylan et Patti Smith ou encore avoir une discussion avec Anaïs Nin et Simone De Beauvoir, c’est jouissif. Les spectateurs ne sont pas du tout obligés de venir costumés ou maquillés. Bien au contraire. Déjà car des surprises les attendent mais surtout car ce qui nous intéresse c’est eux, au plus profond d’eux-mêmes. C’est pour cela que nous l’avons monté. Nous leur proposons un spectacle certes, mais surtout nous les invitons à s’interroger sur eux-mêmes et sur le monde. Pas besoin de mettre un perfecto en cuir pour ça. Et de toutes façons, nous saurons trouver leur coeur de rockeur même sous un survêtement Tacchini.

As-tu des indices ou conseils afin d’accéder aux salles cachées et autres surprises de « HEROES » ?

Petit indice, sans trop dévoiler du spectacle : cherchez les chamanes !

Dot Pierson

Pour les conseils, je ne saurais que les pousser à mettre des chaussures confortables, manger auparavant car le spectacle dure 3h, savoir qu’il va falloir chuchoter au maximum, ne pas hésiter à se séparer des personnes avec qui on est venu car c’est une toute autre expérience et bien regarder dans toutes les pièces : les héros peuvent être n’importe où. Bref être curieux et ouvert. Ha si, et ne pas oublier des bouchons d’oreilles pour les plus sensibles.

Mise à jour post-expérience en vidéo :

Vidéo : Antoine Della-Maria

Avant Héroes tu avais mis en scène d12ouze (performance sur l’intime pour 12 spectateurs par séance, qui permettait entre autres de s’échanger des secrets) pourquoi aimes-tu autant « l’immersif » ?

Il y a encore 2 ans, je ne connaissais absolument pas l’immersif, pourtant datant des années 70, c’est dire si j’étais en retard.
Il s’avère que D12ouze était à la base une commande de spectacle sans spécialement être catégorisée. Ayant carte blanche, j’ai écrit une première version. Après l’avoir joué, beaucoup ont fait le lien avec Sleep No more et j’ai donc commencé à faire des recherches. J’ai continué à la suite à le développer avec mon co-metteur en scène Grégory Ragot avec lequel nous avons beaucoup poussé les questionnements sur l’immersif. Et puis j’ai rencontré Léonard Matton qui a monté “Helsingor “ (Hamlet en immersif) et “Le secret” premier lieu à Paris de théâtre immersif. J’ai eu la chance qu’il me propose de rejoindre son équipe et j’ai appris énormément à ses côtés. A partir de là, il y a eu ma rencontre décisive avec Jules Guillemet. Avec lui, nous avons monté Hummm qui propose des expériences immersives qui ont du sens pour des marques mais aussi des spectacles de création. Je lui ai proposé l’idée de Heroes et c’est devenu le premier spectacle de création que nous montons avec notre collectif. Nous l’avons écrit à 5 (avec Laure Garnier, Camille Jourde et Laurent Henode) et nous le co-mettons en scène avec Jules. Je crois avoir définitivement attrapé le virus de l’immersif. Alors que j’avais commencé par le cinéma mais n’y trouvant plus mon compte, ayant mis en scène au théâtre mais étant frustrée par le 4ème mur : j’ai enfin trouvé ma forme.
L’important pour moi étant le public, le rapport à celui-ci et ma thématique principale étant l’intimité, je ne pouvais pas être plus épanouie que dans l’immersif. Et puis travailler avec des comédiens en immersif est fascinant. Déjà, la mise en scène est différente; il faut qu’ils sachent improviser, qu’ils aiment créer du lien avec l’autre, qu’ils veulent donner et recevoir. C’est fascinant, enrichissant et un honneur de travailler avec ces artistes complets.

Tu étais aussi de l’aventure du Secret, 1er écrin d’expériences immersives parisien, comment vois-tu le futur de ce genre très apprécié des anglo-saxons et qui irradie en ce moment en France ?

Demain sera immersif, de toutes évidences. Il y a de la place pour toutes les formes, toutes les créativités et tous les possibles.
La seule chose que je crains c’est évidemment l’effet de mode : chacun va y aller de sa version immersive. A partir du moment où l’on placera un comédien près d’un spectateur, cela aura l’appellation immersif. J’espère juste que les metteurs en scène et producteurs ne galvauderont pas trop cette forme et qu’ils n’oublieront pas l’essentiel du travail immersif : le public.

Infos pratiques :

Le site du spectacle :
https://www.spectacleheroes.com/
 
La page facebook du spectacle :
https://www.facebook.com/heroesspectacle
 
L’événement facebook :
https://www.facebook.com/events/579184922599595/

INTERVIEW EXCLUSIVE : J’ai été élève dans une école de Sorceleurs en Pologne !

INTERVIEW EXCLUSIVE DE NATSUKI, Elève de la Witcher School, école de sorceleurs en Pologne, entre Austenland et Poudlard.

Natsuki
Natuski et le fameux médaillon.

Rendez-vous  a été pris très vite avec Natsuki au retour de sa première session. Savoir qu’elle revenait d’une semaine dans une « école de sorciers » ne pouvait que nous intriguer.

Tout a commencé avec la lecture d’une série de livres, La Saga du Sorceleur de l’auteur polonais Andrzej Sapkowski. « Le Tolkien moderne, le Stephen King polonais ! » s’enthousiasme Natsuki.

L’histoire est construite autour du personnage de Geralt de Riv « un mutant qui, grâce à la magie, un mystérieux élixir et à un long entraînement est devenu un meurtrier parfait. Ses cheveux blancs, ses yeux nyctalopes (qui voit dans la pénombre) et son manteau noir effrayent et fascinent. Il parcourt des contrées pittoresques en gagnant sa vie comme chasseur de monstres. En ces temps obscurs, ogres, goules et vampires pullulent, et les magiciens sont des manipulateurs experts. Contre ces menaces, il faut un tueur à gages à la hauteur. Car Geralt est plus qu’un guerrier ou un mage. C’est un Sorceleur ! ».

Un univers déjà adapté en série TV, en film (aux très mauvaises critiques) en BD, en jeux de plateau et en plusieurs jeux vidéos à succès (25 millions de copies vendues) dont voici quelques images du dernier opus :


(c) CD PROJEKT

La communauté de fans est donc internationale et comme pour toutes franchise s’adonne au fanart ou cosplay. Grâce à Natsuki nous savons qu’il existe aussi un jeu de rôle grandeur nature (ou LARP : Live Action Role-Playing Game) immersif en Pologne plusieurs fois par an : la Witcher School.

Natsuki nous confie : « Au début je croyais que c’était une blague, un événement marketing pour le lancement de DLC (extensions de jeux vidéos), puis je me suis inscrite pour une session en Pologne. Il s’agit d’un GN (jeu grandeur nature) sur 3 jours avec une trame mais sans scénarios trop fermés : toutes les paroles échangées sont improvisées ! »

En marche ! vers les monstres

Tout l’aventure se fait en anglais. Nous recevons après avoir payés environ 370 euros une fiche résumant le personnage que nous allons devoir incarner. Avec ses traits de caractères, motivations, qualités, défauts, et ses quêtes à accomplir.

Mercredi soir. Nous sommes un groupe nombreux : 120 participants (d’Allemagne, Sibérie, Etats-Unis…) qui connaissons tous très bien les livres. Nous nous retrouvons à l’aéroport de Wrocław. Un bus nous emmène à 1h30 de la ville, au château de Moszna Castle (construit au XVIIe sc.). Le contexte est très important nous sommes coupés de notre vie quotidienne, quand nous découvrons le château on a un effet « Wahouuuu » : nous allons rester 3 jours dedans, y manger, dormir, se battre.

Moszna

Environ 30 personnes composent le staff de l’équipe sur place. Nous sommes pris en charge par Bartek. L’organisation peut te prêter un costume, certains participants ont déjà apportés les leurs. Nous partageons notre chambre ou pas. Les 120 participants sont divisés en plusieurs groupes de 10/15 personnes entraînés par un « Master ». Exemple de nom de groupe « Les Phoenix ! ». Un accueil nous résume les règles de vie :

– comment rentrer dans la peau de son personnage,

– le système d’In-game / Off-game (toutes les chambres, escaliers de secours sont des espaces où vous pouvez re-devenir vous-même, espaces de pauses indispensables)

– interdiction au téléphone portable pendant les 3 jours. Les participants acceptent avec plaisir, ce ne serait pas très RP ! (Role Play) ou Fair Play 😉

Le Baptême du feu

Nous partageons un festin avec menus vegan, sans gluten etc. (Les participants ayant d’intenses efforts physiques à faire pas de problème de manque d’alcool visiblement).

Photo : Kamil Nowakowski
Photographie : Kamil Nowakowski

« Dès que je termine ce dernier discours vous êtes dans votre personnage » précise l’animateur Bartek. Au son d’une cornemuse nous rentrons dans le jeu : à partir de cet instant nous sommes notre personnage. Nous avons pu choisir au départ 2 niveaux : un rôle 100% actif demandant beaucoup d’improvisation, ou un rôle moins actif. 

J’ai senti comme un halo au moment où 120 personnes devenaient leurs personnages sans dire un mot !

« Tout le monde dans la forêt ! » crie le Master. C’est le lancement d’une chasse aux monstres qui va durer trois jours.

Photo : Kamil Nowakowski
Photographie : Kamil Nowakowski

Une journée et une nuit à la Witcher School

Comme dans une vrai école les participants ont des cours : « de self-défense, d’écriture et fabrication de potions, d’étiquette, de tir à l’arc, de survie en forêt. La prochaine fois j’aimerai suivre les cours de runes anciennes ! » 

Les professeurs imposent le respect, et d’une certaine manière la « peur ». Pour les petits nouveaux tout démarre avec l’épreuve des herbes.

C’est le soir le plus compliqué ! le scénario s’accélère et ton Master te donne ta quête, par exemple récupérer des os dans le cimetière et combattre. La mise en scène est géniale avec effets de fumées, lumières dans la forêt, monstres. Des acteurs ont dû forcément nous attendre dans le froid… Tu peux choisir de tuer ou pas, coups d’épées (en latex) contre coups de griffes. Si tu meurs tu deviens « spectateur ».

Le Dernier Voeu

Samedi soir, c’est la fin de l’aventure. Tout se termine, une petite fête avec les musiciens qui ont composés la musique du jeu vidéo, danses et cracheurs de feux.

Natuski ne voit qu’un seul défaut dans cette immersion, et ça concerne la richesse de l’univers : Parfois nous ne sommes pas au courant des multiples scénarios  annexes (par exemple les « items » de culture elfique à chercher)…

Pour les joueurs qui reviendront à la prochaine session, nous ferons semblant de nous être entraînés pendant 6 mois. Certains ont de vrais entraînements grâce à des cours d’escrimes, d’autres ont un métier proches de leur personnage : le travail du cuir par ex. Nous restons en contact via des groupes Facebook. On se parle en tant que personnage ou pas forcément. La communauté des anciens élèves rassemble des gens adorables. 

Pour rejoindre Natsuki à une prochaine session :

WS

 

Site de l’école : witcherschool.com/en/home/

Facebook de l’école : WitcherSchool/